jeudi 28 février 2019

"Le premier jour de ma mort" - Philippe Sohier

Philippe sohier

De Philippe Sohier, éditions Hugo Roman, Roman, Mort, 2015.

Résumé :

"C'est pas vrai ! Pas moi ! Je ne vais pas crever maintenant ! J'ai encore rien dis ! " se répétait Albert qui croyait rêver. […] " Je vais crever ! " se répétait-il. Ses mots résonnaient dans son crâne et il avait infiniment peur, peur au point de se pisser dessus. À quelques centimètres de lui, sa femme Clara dormait d'un sommeil profond. Elle était allongée sur le dos. " Ce matin-là, Albert se réveille avec la certitude qu'il va mourir aujourd'hui. À ses côtés, sa femme dort et il n'ose pas la réveiller et préfère laisser son angoisse de la mort l'envahir. Il fait ainsi défiler le cours de sa vie aux côtés de cette femme qui l'a aimé au-delà du possible, renonçant même à avoir cet enfant qu'elle désirait tant. C'est cette longue journée que nous fait vivre Philippe Sohier en nous faisant découvrir une vie faite de renoncements, de mensonges et de non-dits qui rongent… Un roman poignant, vrai et sincère sur la vie, l'amour, le temps qui passe.

Mon avis :


    Albert se réveille avec une douleur lancinante dans la poitrine. Il en est persuadé, aujourd'hui, il va mourir d'une crise cardiaque. Cela commence avec cette douleur qui l'étreint sans qu'il ne puisse la soulager. Il ne bouge plus, reste immobile dans ce lit où sa femme Clara se tient à côté de lui. Il réfléchit à sa vie, à ce qu'il a fait comme choix. Il refuse d'inquiéter Clara et ne lui dit rien, ne l'appelle pas au secours. Albert prend conscience de ce qu'il a construit dans sa vie, de ses choix purement égoïstes. Il se rend compte que son mariage se ternit, il aimerait pourtant vider son cœur et parler, avouer tous ses mensonges et ces non-dits. La journée avance, la douleur s'apaise, mais revient l'étreindre. La mort rôde et au final, la grande Faucheuse fera-t-elle son apparition ?

    Albert est un personnage aussi insupportable qu'égoïste. Il ne pense qu'à son petit confort, à lui, ses plaisirs, ses envies, ses passions, ses lubies, son futur… Même si à ses côtés se trouve une femme qui l'aime, on se demande ce qu'elle peut lui trouver, si le voile de l'amour est définitivement aussi aveugle. Et alors qu'il pense faire une crise cardiaque, il est encore enseveli derrière son égoïsme et son orgueil mal placé. C'est de loin le personnage que j'ai trouvé le plus insupportable (alors qu'il y a des méchants vraiment méchants qui ne lui arrivent pas à la cheville).
Vous l'aurez compris, Philippe Sohier a réussi à créer un personnage réaliste et qui a fait dresser mes cheveux sur ma tête.

    C'est surtout une histoire de non-dits, un huis clos étouffant avec un personnage qui n'est pas ce qu'il prêtant être, profitant de silences qui sont forcément interprétés. Il n'y a pas pire que les silences, et la vie entière d'Albert repose sur des stratégies pour obtenir ce qu'il souhaite. Albert est un anti-héros en puissance qui, pensant la fin proche, fera un bilan sur son existence et sur son couple qui aujourd'hui n'est plus celui du début. Le temps passe, les mensonges demeurent.

    Qu'il s'agisse de Clara ou de son fidèle ami Emile, la puissance des non-dits est importante, et nous allons de révélation en révélation. La mort est un personnage rodant autour de la vie des protagonistes. Même si elle semble absente dès le début, c'est elle et l'impression de son éminence qui nous vaudra les confidences d'Albert.
    L'auteur réussi en tout cas à me faire ressentir fortement l'exaspération, la colère et l'irritation contre un personnage qui certes n'est pas réel, mais qui existe hélas dans la réalité (on ne se le cache pas, personne n'est parfait). Qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme, l'honnêteté est la base de toute relation sociale et intime. C'est mon avis, et c'est sans doute pour cela que le livre m'a autant heurté.

En bref :

Une histoire qui irrite, un anti-héros insupportable d'égoïsme. Une lecture qui ne laisse pas indifférente autour de l'impression de mort, mais aussi sur le bilan de vie que l'on dresse lorsqu'on pense celle-ci proche.

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