En partenariat avec les éditions de la Rémanence que je remercie.
De Roger Raynal, aux éditions de la Rémanence, Roman, 2018.
Résumé :
Au début des années 90, à Toulouse, un étudiant en sciences amoureux des mots rencontre Satoko. Elle est venue étudier, pour un seul semestre, la littérature française. Peu à peu, en dépit de leur différence de culture, les jeunes gens se découvrent, puis s’aiment. Dans ces beaux instants rythmés par les œuvres qui les enchantent et les rapprochent, chacun préfère ignorer le bruit du temps : Satoko devra bientôt rentrer. Sauf si…
Mon avis :
Lorsque Satoko fait la rencontre d'un étudiant toulousain pendant son année d'étude en France, elle n'imaginait pas la relation qui en découlerait. Le jeune homme lui-même se laisse bercer par des rencontres qui ne font pas d'eux réellement un couple, mais qui y ressemble un peu. De ces moments à deux, naîtront des échanges sur le sens de la vie, des sentiments, sur les nombreuses beautés de la littérature française ou japonaise. De Toulouse à Tokyo, nous voyageons à côté de cette rencontre atypique, peut être également bercée par une forme d'illusion.
J'ai reçu le livre il y a quelques mois déjà. Je l'ai lu une première fois, l'année 2018 a été un peu rude au niveau santé, et cela m'a donné un goût de liberté, une légèreté. J'ai ensuite relu ce livre durant les périodes de Noël, y ressentant les mêmes émotions : un sourire un peu naïf en observant deux jeunes "adolescents" découvrirent leur sentiment. Les mots glissaient sur le papier, avec des tournures poétiques, des descriptions permettant de visualiser la scène, comme si on y était.
Le style de l'auteur m'a frappé dès les premières pages : très recherché, poétique, puisant de nombreuses références dans la littérature et dans ce qu'elle a de plus attirant. Les expressions, le vocabulaire, les métaphores peuvent paraître lourds. J'y ai trouvé un vrai plaisir de lecture : un style que je n'avait pas lu depuis un livre que je n'ai pas encore présenté (que je relis actuellement pour la 3e fois tant il est complexe à décrire). Un style qui met en avant toute la beauté de la langue française, tout son panel de beaux mots, ses couleurs et intonations, ses émotions et le plaisir des belles phrases. C'est pour moi, un point fort de ce livre : la recherche constante d'une prose étudiée, variée, même si on y trouve de la redondance avec des expressions répétitives de chapitre en chapitre. Mais en me lisant bien, chacun pourra aussi trouver chez moi les tournures que j'utilise à l'usure.
Le personnage de l'étudiant, je m'en faisais la remarque pendant la seconde relecture, je n'ai pas souvenir d'avoir eu son prénom prononcé à un seul moment. Ce personnage est déstabilisant. Autant on y aime son vocabulaire et sa capacité, parfois un peu trop, à fournir des citations entières de roman ou poème (j'en suis incapable pour ma part.), autant il peut agacer dans ses non dits. Par moment j'ai juste eu envie de lui dire : "sois plus clair, dis les choses telles qu'elles sont".
Satoko, à l'image de nombreuses Japonaises et de cette culture si attrayante, est plus effacée, avec un caractère fort que l'on ressent non dans les échanges ou les citations qu'elles prononcent, mais dans ses actes. Cultivée, elle n'est pas éclipsée par la culture du jeune étudiant. J'ai aimé la différence entre Satoko comme perdu à Toulouse, un peu éteinte, et celle que l'on retrouve à Tokyo, épanouie dans un environnement qu'elle maitrise.
Une chose qui m'a gênée en première lecture, mais que je prends avec recul aujourd'hui, ce sont les propos tenus par le jeune étudiant sur la France, sa langue, ce qu'elle est devenu. Mais lorsqu'on s'intéresse un peu à la culture japonaise et surtout à la façon dont ils apprennent notre langue et notre culture, on peut comprendre le dépaysement, le choc que cela peut faire. Il existe un véritable choc entre la jolie carte postale de la tour Eiffel et la réalité des rues pas toujours propres, des services qui peuvent avoir du retard, la belle littérature qui n'est pas retranscrite ainsi dans notre quotidien. Alors oui, je comprends ce choc, je comprends ce qu'a voulu dire ce jeune étudiant. Nos pays sont différents, nos sociétés sont à l'opposé, et peut-être en attend-t-on trop ?
Je n'ai pas été choquée que cela soit décrit dans ce livre, cela est souvent dit au Japon… Cela est tout même pénible à entendre. Nous sommes perfectibles face à un pays dont le conducteur de train s'excuse platement pour 2min de retard… D'ailleurs, les cours de "discussion" ont beaucoup de succès : apprendre une langue oui, mais savoir discuter dans celle-ci est bien différente. On se souvient tous de "Where is Brian ?". Il n'a pas dû quitter la cuisine depuis de nombreuses années. On apprend plus facilement une langue en l'entendant et en la pratiquant dans le quotidien.
En bref :
Une lecture plaisir, un voyage littéraire et dans la complexité du sentiment amoureux. Le plaisir aussi de me noter certaines références littéraires, nombreuses dans ce livre, qu'il s'agisse du temps passé à Toulouse ou alors à Tokyo. Le plaisir d'avoir lu une histoire d'amour où la littérature a servi de flèche d'Apollon.
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