lundi 30 octobre 2017

"Je m'appelle Léon" - Kit De Waal


Merci NetGalley et Aux éditions Kero pour ce livre.

De Kit De Waal, éditions Kero, 2016, Roman, Histoire de Vie, Famille. 
Résumé :

Leon, 9 ans, est un garçon courageux. Quand un jour sa mère n’arrive plus à se lever le matin, il s’occupe de son demi-frère Jake. Quand l’assistante sociale emmène les deux garçons chez Maureen au gros ventre et aux bras de boxeur, c’est lui qui sait de quoi le bébé a besoin. Mais quand on lui enlève son frère et qu’on lui dit que chez ses nouveaux parents il n’y a pas de place pour un grand garçon à la peau sombre, c’en est trop. Heureusement, Léon rencontre Tufty, qui est grand et fort, qui fait du vélo comme lui et qui, dans son jardin, lui apprend comment prendre soin d’une petite plante fragile. Mais Léon n’oublie pas sa promesse de retrouver Jake et de réunir les siens comme avant. Le jour où il entend une conversation qui ne lui était pas destinée, il décide de passer à l’action…

Mon avis :

    Lorsque j'étais enceinte, j'avais découvert un livre de Cathy Glass. Je ne connaissais rien de l'auteur et ai découvert au fil de la lecture son travail en tant que mère d'accueil. Les témoignages sont affligeants, dramatiques et font réfléchir sur l'humanité de certaines personnes. Lorsqu'on touche à l'enfance, une part de moi a envie de hurler. Aujourd'hui maman, je suis encore plus sensible à ces histoires... 
 
    Léon est un garçon fort, courageux. Sans le savoir, il possède en lui une vraie force. Alors que sa maman sombre dans la dépression, il devient sa béquille, essaye de s'occuper d'elle, de lui et son petit frère Jake. Il fait de son mieux, mais arrive le moment où il doit demander de l'aide à sa tata Tina, la voisine du dessus, et de là, ils seront tous les deux retirés à leur maman par les services sociaux. Ils emménagent chez Maureen, femme au cœur grand comme ça qui va prendre soin de lui et de son petit frère. Une fois Jake adopté, il se retrouvera seul. Maureen tombe malade et Léon ira vivre avec la sœur de celle-ci. Il y fera des rencontres importantes, et là se jouera son avenir. 

    Même s'il s'agit d'une histoire, d'un roman, je n'ai pas réussi à le lire sans me dire que cela est vraiment arrivé. Il émane des sentiments différents de ma lecture : de la tristesse, de l'inquiétude, la fameuse ride du lion, et de l'espoir. Je suis maman, j'ai eu cette envie de "protéger" ce petit garçon. En cela, le livre est réussi : on s'immerge, on accompagne ce petit garçon. L'écriture, et sa traduction, y aide beaucoup : le ton est tout d'abord enfantin, puis il mûrit doucement à mesure que Léon grandit. 
    Il y a aussi beaucoup d'espoir : il y a beaucoup de non-dits, de choses qui sont cachées à l'enfant pendant ces périodes ou tout du moins qui ne sont pas expliqués de façon suffisante. On ressent bien le questionnement de l'enfant, les incertitudes. 

    Les liens qui unissent les personnages sont différents. Il y a la famille qu'on quitte, et celle qu'on se fait. Lorsque Léon retrouve Tufty dans un grand jardin, celui-ci lui apprend les rudiments du travail de la terre, des plantes. Ces rencontres seront simples, mais importantes pour l'enfant qui y côtoiera d'autres hommes. Il y a ici la recherche de la figure paternelle, une figure masculine qui est aussi importante pour un enfant pour se développer. 
    L'équilibre que Léon trouvera sera toujours fragilisé par ses incertitudes, ses envies de revoir son frère, parfaitement légitime, son inquiétude d'être seul. 

    Le style de l'écriture m'a gêné au début de la lecture. Je pensais que cela durerait quelques chapitres, mais il y a eu des passages laborieux, dense, répétitifs. Cela a alourdi ma lecture.
    Cependant, dans un sens, cette façon de raconter l'histoire par les yeux de l'enfant est un parti-pris que je respecte : il y a besoin de parler de l'incertitude et de ce vide ressenti pendant ces expériences. 

    Enfin, une partie du livre raconte le racisme : Léon a un papa noir, il est donc métisse. Son petit frère blond aux yeux bleu d'un autre père. Ce dernier a trouvé une famille pour la vie. Léon patiente pour trouver sa place. Vers la fin du livre, l'auteur y raconte une émeute. Le rythme était soutenu, et en parallèle il y avait la souffrance de ce jeune garçon dont je vais taire les circonstances ici. Ce passage aurait mérité d'être davantage étayé à mon goût. 
    Je ressors de cette lecture heureuse de cette fin, même si mes pensées vont directement aux enfants qui n'ont pas la chance de trouver un dénouement heureux. 

En bref :

Une histoire racontée par les mots d'un enfant, avec autant d'incertitudes que de bons sentiments. La question de sa place, de faire partie d'une famille, même si celle ci ne ressemble à aucune autre, résonnent encore. 

dimanche 29 octobre 2017

"La loi du Phajaan" - Jean-François Chabas


Merci à NetGalley et à Didier Jeunesse pour cette opportunité. 

De Jean François Chabas, éditions Didier Jeunesse, 2017, Jeunesse à partir de 12 ans, Animaux, Roman.

Résumé :

Dans la famille de Kiet, on est dresseur d’éléphants de père en fils. Le jour de ses dix ans, Kiet part avec son père et des chasseurs pour capturer son premier éléphanteau. Pendant plusieurs jours, l’enfant participe au « Phajaan », une méthode de dressage traditionnelle particulièrement cruelle qui marquera à jamais le jeune garçon…
Didier Jeunesse soutient EVI (Eco Volontaire International), une association dont le but est d'intervenir pour la protection des animaux sauvages et de l'environnement dans le monde, ainsi que de consolider un lien respectueux entre les humains et la nature.

Mon avis :

    J'aime les animaux. J'ai 3 chats, tous sauvés petits.
Depuis toujours j'ai une vraie sensibilité pour ces êtres si impressionnant. Tous les animaux me fascinent pour différentes raisons, j'ai aussi mes animaux préférés. Pendant longtemps quand j'étais plus jeune, je regardais les documentaires animaliers. J'étais admirative de leur capacité à survivre. J'étais terriblement triste de voir la Nature agir lorsque les animaux carnivores dévoraient les autres. J'étais triste de les voir mourir. Je suis triste de voir ce que l'Homme a pu faire à leur écosystème. 

    Kiet est âgé aujourd'hui. Mais il se souvient de ce moment. Il se souvient de ces cinq jours qui ont suffit à lui laisser dans l'âme une cicatrice à vif. Il a dix ans quand son père, le mahout comme ses ancêtres avant lui, l'emmène avec d'autres hommes du village pour lui chercher un éléphanteau. Une fois trouvé, la ruse, l'adresse et la cruauté du mahout seront indispensables pour attraper cet animal, malgré la protection de la matriarche et des autres éléphants. Une fois attrapé, il nous raconte les cinq jours qui seront utiles au phajaan, technique pour "briser" l'animal et le rendre docile. Malgré les atrocités, malgré la culpabilité, Sura, l'éléphanteau et Kiet tisseront un lien fort.

    Je suis adulte. Je connaissais cette pratique pour avoir découvert des reportages affligeant sur le tourisme. Je suis aussi très sensible. Alors oui, c'est de la littérature jeunesse, et oui, ce livre m'a ému. J'ai lu avec de la rage en moi. J'ai lu avec les larmes aux yeux pendant certains passages. J'ai lu avec de la colère et de l'incompréhension mêlée. J'ai lu avec peine les cinq jours d'enfer que vivront Sura et Kiet. Les émotions sont vives, car ce livre raconte la réalité de ce qui fut, est et sera encore si rien n'est fait. 
    L'écriture est efficace. Il y a des passages très difficiles, mais utiles dans la compréhension de l'histoire. Cela fait un effet électrochoc, et peut être difficile à lire. Mais cela dépeint une réalité. J'ai apprécié que le phajaan soit décrit. J'ai apprécié la façon dont l'auteur nous a montré la relation naissante entre Sura et Kiet, cette complicité. Il y a des passages dont l'émotion est importante. 

    La force de cette histoire, c'est aussi la prise de conscience de Kiet. Il refuse de porter les coups, mais les actes posés lui sont imposés par son père. Comme il le dit, à dix ans, il ne peut pas aller contre la décision du père. Cela le hantera longtemps. J'ai beaucoup aimé la façon dont Jean-François Chabas nous a fait suivre son éprouvante expérience. La force des émotions est une part importante de ce livre. 

    Le phajaan est une cruauté. Une de plus dans le monde "intelligent" de l'être humain. Le fait de le mettre en lumière est important : cette technique, qui a évolué et qui est bien explicitée dans le livre, est utilisée aujourd'hui pour "dresser" et asservir les éléphants pour que les touristes montent sur leur dos. Des exemples de cruauté dans le but de faire des bénéfices avec le tourisme sont légions. Bien trop nombreux. 
    L'éléphant est un animal imposant, doué d'intelligence, de mémoire, de sentiment. Un animal qui est aujourd'hui décimé pour servir les besoins avares de personnes dénuées de sentiments, ou pour leur ivoire. S'il y a une offre, c'est qu'il y a une demande. Ce livre est donc utile : prendre conscience que ces pratiques ne doivent pas être tolérées. Ni ici, ni ailleurs. 

    Une action n'a pas à être grandiose. Une action, même minime, jouera de son poids. 

    Instruire la jeune génération, c'est lui donner les clefs pour que ce qui fut cruel ne se reproduise pas
     Merci Didier Jeunesse. Merci Jean-François Chabas.

Plus d'informations : EVI ; Wildlife and Environmental protectetion Worldwilde  



En bref : 

Un livre qu'on lit avec une forme de rage mêlée à de la tristesse. Un plaidoyer pour la protection des animaux, une prise de conscience pour un rituel qui n'aurait plus lieu d'être. Une réflexion sur la protection des animaux.
 


mercredi 25 octobre 2017

"Jeff Madison et la malédiction de Drakwood - Tome 2" - Bernice Fischer


Merci Laure Valentin pour m'avoir permis de me replonger dans cette aventure. 

De Bernice Fischer, traduit par Laure Valentin en autoédition disponible sur Amazon, 2016, Jeunesse, Aventure, Roman.

Résumé :

« Frappe la peur en pleine poire. Sois un véritable ami. Accomplis ton devoir. »
Jeff Madison attrapeur de rêves, ami fidèle et adolescent intrépide – doit sauver son meilleur ami Rhed d’un sort dévastateur qui lui a été lancé lors de leur dernière visite à Drakmere. Mais depuis ce sombre royaume, deux sorcières maléfiques libèrent sur eux leurs horreurs innommables. Jeff peut-il vaincre les affreuses criatures de Wiedzma et les spectrifiés mangeurs d’hommes de Zorka ? Alors que les criatures de Wiedzma menacent la famille de Jeff et que les zombies de Zorka réclament leur sang, la malédiction de Rhed met sa vie en danger… Le temps lui est compté. En mettant à profit ses dons d’attrapeur de rêves pour sauver ses amis qui ont entrepris le voyage vers la forêt de Drakwood à la recherche d’un remède pour Rhed, Jeff s’enfonce sans le savoir dans les ténèbres profondes. Dans cette nouvelle aventure fantastique pleine d’action, nous retrouvons les courageux guerriers sandustiens, Rig et Madgwick, accompagnés de la sorcière Angie, hilarante et bougonne, et nous faisons la connaissance des nouveaux guerriers Khrow et Horrigan, ainsi que de Watroc, un dragon affamé. En fin de compte, c’est à Angie que reviendra la tâche de négocier pour la vie de Rhed. Réussira-t-elle ou Rhed sera-t-il abandonné à jamais auprès du prince de la forêt de Drakwood ?

Mon avis :

    Lorsque je lis de la fantasy, la sensation est différente que lorsque je lis un roman plus "classique". Vous le voyez aux livres que je présente, je lis vraiment toute sorte d'univers. La fantasy me ramène à une époque où l'imaginaire pouvait sembler réel. L'enfance et l'adolescence sont des moments dans une vie où on a besoin de se réfugier dans une lecture, d'avoir des héros auxquels on peut croire, espérer des aventures mystérieuses et haletantes. Jeff Madison réussit à transporter son lecteur dans son univers. Le public cible est le jeune adolescent. 
   Oui bon, je ne suis pas si vieille après tout... Quoique... :-) 

    Nous retrouvons dans ce second tome les deux amis Jeff et Rhed.. Du retour de Drakmere, Rhed est tombé malade. Si rien n'est fait pour le guérir, il sera changé en arbre à tout jamais. Pour trouver le remède, Jeff décide de retourner sur les terres sombres et mystérieuses. Dans ce nouveau voyage, il sera accompagné de Rhed et Phoebe. Il retrouve les amis et guerriers qu'il a connu et quitté lors de son précédent voyage, et leur aventure est lancée. 

    Il est toujours délicat de parler d'un second tome, car j'ai toujours peur d'en dévoiler trop ou trop peu. Malgré tout, il s'agit de littérature jeunesse, donc on se doute que oui, nous y trouverons de l'aventure, de la magie, des rencontres mêlant humour et action. J'ai eu le plaisir de lire le premier tome, "Jeff Madison et les ombres de Drakmere", que j'avais beaucoup aimé.
    Je retrouve ici ce que je vous disais du premier tome : le traitement des personnages de façon parfois trop "lisses". Cependant, encore une fois, je ne suis pas le public cible, donc il n'y a pas l'utilité d'approfondir de la même manière la psychologie des personnages. Du fait d'avoir vécu des aventures dans le premier tome, les adolescents gagnent en maturité. Ce qui montre qu'ils avancent aussi sur leur chemin, qu'ils ont appris, grandis. 

    L'univers de Drakmere est toujours aussi agréable, bien mis en valeur, et les descriptions ne souffrent pas de longues pages de détails. L'auteur a su doser ce point. Elle a également pris le pli de nous replonger directement dans l'aventure. Bernice Fischer joue avec les intrigues dans ce tome, l'agrémente de réflexion en semant, je pense, des indices pour le prochain tome. Elle garde en haleine le lecteur sans alourdir le texte. 

    On retrouve des thèmes importants dans la littérature pour adolescents : on parlera de dépassement de soi, de courage, de culot aussi, car Jeff usera de malice envers ses adversaires. Cela prête à ridicule, fait rire, mais grincer aussi. L'amitié est importante dans ce tome, plus encore que dans le premier, je trouve : Rhed est en danger, Jeff se surpassera pour l'aider. 
    Enfin, j'ai apprécié le rythme du livre : l'action est savamment dosée, les intrigues se résolvent ou s'amplifient progressivement. L'écriture de Bernice Fischer est agréable, et encore une fois, cela me ramène à une époque révolue : lorsque les sorcières et les personnages de ces livres venaient hanter mes rêves quand j'étais enfant. 

Ah, nous sommes bientôt Halloween... 

En bref :

Un second tome réussi, mélangeant les créatures fantastiques au courage du héros. Une lecture jeunesse mêlant la tension et l'humour. À recommander ! 


mardi 24 octobre 2017

"Le maire qui aimait les arbres" - Jean Chalendas


De Jean Chalendas, éditions Actes Sud, 2017, Nouvelle, Nature.

Résumé : 

L'arbre au cœur de la cité a cédé sa place aux voitures, au bitume. En disparaissant, c'est l'espace de déploiement du lien social qui disparaît. Un maire s'insurge contre ce phénomène d'isolement de sa population et entreprend d'agir. Cette nouvelle en forme de conte appelle à rêver de l'enchantement d'un monde où la ville retrouverait la proximité de la forêt qui lui a fait place. On peut également lire ce texte comme un manifeste politique qui évoque des solutions concrètes pour les cités de demain.

Mon avis : 

    J'aime la nature. J'aime profiter de longues promenades avec mon loulou dans un endroit où il peut côtoyer les arbres, les oiseaux, la nature. Vivant en ville, je n'ai pas le plaisir d'avoir autant de verdure que dans un village ou la campagne. Cependant, nous avons nos petits endroits où les arbres sont hauts et où le bitume n'est plus maître. Quelle joie et quel bonheur !

    "Le maire qui aimait les arbres" est une nouvelle qui fait du bien. Certes très (trop) positive, mais une nouvelle qui fait du bien. Les personnages n'ont pas de nom, ils ne sont pas donnés. Le narrateur raconte sa rencontre fortuite avec ce maire et la façon dont il découvre son envie de reboiser sa ville, les alentours de sa ville. Il ira au-delà des limites de sa ville emmenant avec lui d'autres maires. Le maire n'y parviendra pas seul, et aidé de la paysagiste, des jardiniers et employés de mairie, mais aussi de la population de sa ville, "l'Homme avait enfin décidé d'habiter sa planète". 

    Sans être un manifeste politique ni le doigt accusateur, cette nouvelle fait du bien, car elle est simple, pleine de bons sentiments et de bonnes actions. La volonté du maire de planter des arbres dans sa ville n'est pas égoïste et ne suit pas de plan politique : il aimerait retrouver la beauté d'antan, donner au piéton des abris au-dessus de la tête lorsqu'il se déplace en plein été, rafraîchir l'atmosphère et l'assainir. Ces bons sentiments font du bien dans une société qui est obnubilé par la réussite, la technologie et le pouvoir. 

    L'histoire est simple, sans être mièvre. L'écriture est soignée sans être lourde. J'ai senti un ton léger, quasi enjoué à ma lecture. J'ai aimé me retrouver dans ces paysages. J'ai aimé sentir ces bonnes intentions. Cette lecture est vivifiante. Le fait qu'il s'agisse d'une nouvelle joue aussi au plaisir de la lecture. Un long roman aurait sans doute été ennuyeux. 
    Enfin, qu'il s'agisse du narrateur au maire ou des autres personnages, j'ai aimé qu'il n'y ait pas de nom. Au final, ils sont superflus tant la nature a droit à être "en haut de l'affiche". 

    Enfin, une lecture qui fait réfléchir sur notre société de consommation, l'importance de la nature et la façon simple qu'il existe de lui donner de la place : a-t-on besoin d'autant de bitume dans nos villes ? Assurément non. Nos sociétés ont déboisé des hectares entiers. Peut-être peut-on, à notre petite échelle replanter et redonner de l'espace à la nature. 


    C'est aussi l'histoire d'une amitié, débutée entre le narrateur tombé en panne de voiture, et le maire, cet homme simple qui l'a accueilli. Pendant de nombreuses années, quarante, ils vont poursuivre leur rencontre, leur échange. Cette amitié et cette confiance entre les deux protagonistes fait aussi du bien, l'auteur mettant en évidence les bons sentiments qui les unis.

En bref : 

Une lecture qui fait souffler, respirer qu'on prend le temps d'apprécier. Elle nous fait aussi réfléchir sur ce lien à la nature.


dimanche 22 octobre 2017

"Légende d'un dormeur éveillé" - Gaëlle Nohant


De Gaëlle Nohant, éditions Héloïse d'Ormesson, 2017, Biographie, Roman.

Résumé :

Pour raconter la vie de Robert Desnos, aussi héroïque qu'engagée, Gaëlle Nohant a épousé les pas du poète, écouté les battements de son cœur, suivi les séances de spiritisme. Elle s'est assise aux terrasses des cafés en compagnie d'Éluard, Man Ray, Picasso ou Garcia Lorca et a dansé des nuits entières au Bal nègre aux côtés de Kiki et de Jean-Louis Barrault.
Son investigation littéraire est fabuleuse, subtile et magistrale. Une traversée du XXe siècle, vivante et tumultueuse, dans les pas d'un héros dont on ne peut que tomber amoureux.

Mon avis :



    Les biographies m'effraient. J'ai souvent l'impression qu'on égraine inlassablement des dates. Malgré tout, je reste toujours curieuse de cet art, car raconter la vie de quelqu'un est difficile : il faut garder de la distance et ne pas être dans le jugement. Robert Desnos, je le connaissais poète, appris à l'école. Je me souviens vaguement qu'on a parlé de sa vie et de son rôle de résistant, mais cela ne me marqua pas. En écoutant Gaëlle Nohant dans l'émission "La grande librairie", je me suis souvenue de sa poésie, et la curiosité a pris le dessus. J'avais envie de plonger dans son histoire. 

    Robert Desnos. Poète, surréaliste, résistant, affectionnant la liberté et les mots, l'opium et l'alcool et les femmes. Un homme qui a connu une fin tragique. Gaëlle Nohant nous fait suivre les rencontres avec d'autres intellectuels, Aragon, Eluard, avant de rejoindre d'autres comme Masson ou Jacques Prévert. On découvre son passage en radiophonie, son travail au sein d'un journal et les mots qu'il utilisera jusqu'à son arrestation par la Gestapo pour résister et lutter contre ce qu'il sait très tôt comme dangereux pour la liberté. 

    Nul doute que ce livre fut long. Pour ma part, il a fait partie de ma catégorie "livre de chevet" : je le retrouvais le soir uniquement afin de ne pas le trouver indigeste. Habitude de lectrice. Pourtant, malgré des passages un peu lourds, j'ai été vite transportée par la plume de l'auteure qui a su trouver le bon ton et les mots pour parler de sa vie. En suivant ses pérégrinations amoureuses, on découvre l'homme de sentiment. En suivant sa création, on découvre son imagination. En suivant le résistant, on découvre sa force de caractère. Gaëlle Nohant nous entraîne avec elle en donnant de la puissance aux personnages, une âme : pas d'ennui, de nouvelles interrogations ont émergées de ma lecture. 
    J'ai particulièrement apprécié les dialogues, retrouvant une ambiance d'un temps révolu. Encore une fois, l'écriture travaillée, le travail incroyable de documentation donne vie à ce livre. La partie sur l'Occupation est fascinante : je n'ai pas lu assez d'ouvrages connaissant les grandes lignes de notre histoire. Ici, l'Histoire se déroulait, personnage à part entière dans ce livre. Gaëlle Nohant lui a donné une résonnance particulière en la présentant avec le rôle de Robert Desnos dans la Résistance. Indéniablement la partie la plus intéressante à mes yeux. 

    Le livre est parsemé de vers du poète. "Je suis le veilleur du Pont-au-Change [...] Je vous salue vous qui dormez". Une façon pour l'auteure de nous faire suivre en parallèle de sa vie, son œuvre qu'elle affectionne. 
    
    Au collège, une de mes professeures qui a été celle qui m'a fait aimer la littérature "classique" nous a dit un jour en classe "qu'un livre, un poème, un tableau n'avait d'importance et de résonnance que lorsqu'on connaît la période dans laquelle il avait été créé". Aujourd'hui adulte, je le comprends davantage. Merci Gaëlle Nohant ! 

En bref : 

Un livre certes long et dense, mais qu'ont plaisir à reprendre entre les mains pour découvrir la vie d'un poète, de ses amours à ses engagements, jusqu'à une fin des plus injuste.
 

samedi 21 octobre 2017

"1816, l'année sans été" - Gillen D`Arcy Wood


Merci à NetGalley et aux éditions La Découverte pour cette opportunité de revenir à des souvenirs. 

De Gillen D`Arcy Wood, aux éditions La Découverte, 2016, Essai.

Résumé :

Un an après Waterloo, en 1816, le monde est frappé par une catastrophe restée dans les mémoires comme l’ « année sans été » ou l’ « année du mendiant »… Une misère effroyable s’abat sur l’Europe. Des flots de paysans faméliques, en haillons, abandonnent leurs champs, où les pommes de terre pourrissent, où le blé ne pousse plus.
Que s’est-il passé ? En avril 1815, près de Java, l’éruption cataclysmique du volcan Tambora a projeté dans la stratosphère un voile de poussière qui va filtrer le rayonnement solaire plusieurs années durant. Ignoré des livres d’histoire, ce bouleversement climatique fait des millions de morts. On lui doit aussi de profondes mutations culturelles, dont témoignent les ciels peints par Turner, chargés de poussière volcanique, ou le Frankenstein de Mary Shelley.
L’auteur nous invite à un véritable tour du monde. Au Yunnan, les paysans meurent de faim, vendent leurs enfants et se lancent dans la culture du pavot à opium, moins sensible que le riz aux variations climatiques.
Dans le golfe du Bengale, l’absence de mousson entraîne une mutation redoutable du germe du choléra, dont l’épidémie gagne Moscou, Paris et la Nouvelle-Angleterre. L’Irlande connaît une effroyable famine, suivie d’une épidémie de typhus, qui laisse de marbre le gouvernement britannique. En Suisse, des glaciers avancent avant de fondre brutalement, détruisant des vallées entières. Aux États-Unis, des récoltes misérables provoquent la première grande crise économique, etc.
Ce livre, qui fait le tour d’un événement à l’échelle planétaire, sonne aussi comme un avertissement : ce changement climatique meurtrier n’a pourtant été que de 2 °C…

Mon avis : 

    J'ai fait une partie de ma scolarité de primaire au sein de l'école Katia et Maurice Kraft. Ce sont deux volcanologues qui ont, par leurs travaux, permis de mettre à disposition des informations et des connaissances sur les volcans. Ils sont mort ensemble, emportés par une nuée ardente au Japon en 1991, sur les flancs sur mont Unzen. Ce livre m'a replongé en enfance, à des basiques si je puis dire, car toute petite, je connaissais la dangerosité et l'immense puissance de ce phénomène naturel. 

    Dans un monde en plein bouleversement climatique, ce livre fait réfléchir aux conséquences d'un élément survenu pourtant quasi à l'opposé du globe. Tambora est un volcan situé en Indonésie. En 1815, son irruption provoque des épisodes mortels à différents endroits du globe. L'auteur fait un parallèle avec l'irruption du volcan de l'île de Santorin en 1600 avant J-Christ et qui provoquera la chute d'une grande puissance, minoenne, et aussi permettra l'exode du peuple juif en Egypte. 

 
    La puissance et la mortalité de cette irruption n'est pas que loc
ale, ainsi, Gillen D`Arcy Wood nous fait voyager à différents endroits, en Europe, en Asie. Les différentes causes des famines, de changement de climat n'étaient pas connues à l'époque. Aujourd'hui, grâce à un travail "climato-historique", les scientifiques parviennent à relier chaque évènement à un point de départ : cette irruption causant une "Année sans été". 

    Il y a une rigueur dans l'écriture et dans le travail de l'auteur. Le résumé de l'éditeur donne également beaucoup d'information concernant les conséquences de cet événement. De plus, on notera que si des Britanniques n'avaient pas recensé cet événement par écrit, il aurait pu tomber dans les oubliettes. Aux conséquences meurtrières s'ajoutent les conséquences économiques : famine, accroissement de la culture du Pavot... L'effet papillon, mais cette fois ci, le battement d'aile est remplacé par un volcan en éruption

    L'essai est particulièrement dense, riche en informations et en sources, ce qui rendait souvent la lecture lourde. Mais il est à portée de compréhension. Évitant d'être uniquement un essai scientifique, l'auteur permet surtout une prise de conscience : il est urgent de repenser notre consommation, les énergies et la façon de les utiliser. Avec l'éruption du Tambora, il n'a suffi que de 2°C en plus pour provoquer ces drames. Aujourd'hui, nous sommes peut-être à l'aube de nouveaux changements climatiques. 

En bref : 

    Un essai nous plongeant dans les conséquences d'une éruption d'un volcan en 1815, aux conséquences meurtrières à plus d'un titre. Un essai qui sonne comme un avertissement sur notre ère.
 

"Hôpital psychiatrique" - Raymond Castells


De Raymond Castells, aux éditions Rivages collection Noir, 2012, Roman, Folie, Histoire

Résumé :

Mai 2010. Louis et Louise, si âgés désormais qu'ils peuvent tout avouer, racontent leur quotidien à l'’hôpital psychiatrique où ils se sont connus pendant la Seconde Guerre mondiale : les supplices infligés par les gardiens, les expérimentations médicales sur les patients et l'arrivée d'un régiment allemand. La cohabitation entre les soldats de la Wehrmacht et les malades mentaux qui se partagent les bâtiments pendant que collaborateurs et résistants se livrent à leurs activités clandestines dans les sous-sols et dans les combles. Et le plan qu'’ils mirent au point pour s'’échapper de cette maison de fous.

Mon avis : 

    L'esprit, le cerveau, la construction de la personnalité. Des sujets qui ont été étudiés et abordé de tout temps ! Qu'il s'agisse de l'Antiquité, du Moyen Âge ou de notre période contemporaine, les déviances intéressent, interrogent. Il n'y a qu'à voir les succès de certains films ou séries sur les tueurs en séries : leur raisonnement nous intrigue et nous fascine. Mais il n'y a pas que les déviances, les maladies mentales, comme la dépression, on en parle davantage et tant mieux ! 
    Étant infirmière, j'ai toujours eu l'habitude de dire à mes proches ou même mes patients que l'anatomie du corps humain est fabuleuse, bien faite et parfaitement logique. L'esprit quant à lui, me fascine par son côté impalpable et déroutant. Nous ne réagissons pas tous de la même manière à un choc, alors qu'en cas d'infection, le processus inflammatoire est le même chez tout le monde : rougeur, chaleur, œdème, douleur. 
    J'ai déjà lu plusieurs manuels sur le corps, l'esprit, les maladies. Mais ils restent des manuels, et je ne sais pas pour vous, mais j'aime beaucoup voir ces connaissances utilisées dans un livre. 

    Louis est accusé d'avoir violé et tué sa sœur. En plus de cela, il est également accusé d'avoir tué sa mère et son beau-père. À la fin des années 1930, il est alors interné à l'asile psychiatrique de Murmont. Parmi les autres patients, il rencontrera des criminels dangereux, des personnes séniles, malades, souffrant de handicap mental encore peu connu (et reconnu) à l'époque. Durant cette incarcération, il tentera de se trouver une place de choix au sein de l'asile, apportant ses réflexions et son aide au Directeur. Malin, futé et perspicace, il réussit à se sortir de situations compliquées. 
    Et il rencontre Louise, en tombe amoureux, et il décide de tout faire pour s'en sortir avec elle. Cependant, entre des gardiens des plus inhumains et l'arrivée d'une garnison allemande dans ces lieux, tout ne va pas se passer comme il le pensait. 

    Malgré la couverture du livre, Louis n'est pas un homme prostré sur son lit en se balançant d'avant en arrière attendant que le temps s'écoule sans fin. Il est malin, utilise ses connaissances et son raisonnement afin d'améliorer son quotidien, mais aussi celui des autres patients par la même occasion. Son accusation sera largement traité dans le livre. Les rendez vous qu'il a avec son psychiatre lui permettront de révéler certaines informations. 
    L'auteur utilise l'histoire de Louis pour rendre compte de la réalité de l'Hôpital psychiatrique et de la façon dont on encadre, soigne et prend soin de ces personnes. Durant la Seconde Guerre Mondiale, les Allemands aimaient déjà les expériences morbides, on se souvient particulièrement de Joseph Mengele et celles qu'il a commises dans les camps nazis. Cependant, Raymond Castells n'aborde pas uniquement les "soins médicaux" réservés aux malades ni les expérimentations. Ce que j'ai particulièrement apprécié, c'est sa façon de suivre Louis et de nous faire découvrir la vie de l'asile à travers ses yeux. 

    L'écriture est très agréable, avec des passages où l'humour permet de dédramatiser la situation. En même temps, j'ai aimé cette bienveillance autour du personnage de Louis. Il y a de la tension avec une forme de huis-clos. Les rapports humains sont mis en avant, avec des souffrances partagées.
    La Seconde Guerre mondiale n'est pas l'élément principal de l'histoire. Elle est là, toujours en arrière-plan. Lorsque la Division allemande s'installe, des résistants se préparent également à leur livrer bataille au sein même de l'asile. Les aliénés ne le sont peut être pas vraiment après tout...  

    Après avoir partagé le livre "Adieu chère Angoisse" d'Adeline Grais-Cernea, j'avais envie de revenir sur ce livre, vous le partager, peut être aussi, à ma petite échelle, parler de ces maladies qui sont souvent mises au banc dans notre chère société qui ne veut qu'une chose : normalité encore et toujours. Mais rappelons-le, personne n'est "normal". Nous sommes tous différents.
    Aujourd'hui, je travaille avec des enfants en situation de handicap mental et j'apprends énormément auprès d'eux, je me sens utile, à eux, aux parents. Oui, la société doit évoluer, changer, accepter davantage l'autre dans toute sa différence. 

En bref : 

Un livre intéressant dressant le portrait d'un système médical qui tend à s'améliorer. Une histoire trépidante, dont les sentiments humains sont largement présents. Louis n'est sans pas aussi fou qu'on ne penserait. 


vendredi 20 octobre 2017

"Adieu chère angoisse ! " - Adeline Grais-Cernea


Merci aux éditions Payot ainsi qu'à l'auteur, Adeline Grais-Cernea pour le concours auquel j'ai pu participer et remporter le livre ! 

D'Adeline Grais-Cernea, aux éditions Payot, 2017, Témoignage, Récit. 

Résumé :

"Chère Angoisse" est le récit intime, dans une langue contemporaine et vibrante, d'une traversée de la naissance d'une crise au retour de la respiration. Voici dix ans d'une cohabitation d'un corps avec l'angoisse. Au fait, c'est quoi, exactement, une crise d'angoisse ? Un petit tracas, une anxiété ? Absolument pas, au menu : palpitations, bouffées de chaleur, transpiration excessive et surtout : sensation d'une fin certaine. L'auteur a tout essayé pour la vaincre (acupuncture, sophrologie, relaxation, psychiatrie, etc.) et nous livre son expérience et ses propres méthodes.

Mon avis : 

    Il est de notoriété publique que l'ignorance est pire que tout. À force de faire comme si elle n'existait pas, on finit par lui donner l'envie de montrer et prouver son existence. L'angoisse est un peu comme ça. Au début, on cherche à ignorer ce qui nous arrive, car au final, "ça va passer". Jusqu'à ce qu'on soit empêtré avec elle dans une situation que l'on pense inextricable. 

    Ce livre n'est pas qu'un livre, mais un soutien, un coup de pouce, un bienfait et un coup de pied dans la fourmilière de la "normalité". Ceux qui n'ont pas connu la réalité de la crise d'angoisse ne peuvent en imaginer l'intensité, la brusquerie, la destruction dont elle est capable. L'angoisse, une fois qu'elle s'est accroché à vous s'immisce au plus profond de votre être et voilà qu'elle détruit progressivement chaque parcelle de votre existence. Notre vie se vie en pause, le cerveau a besoin de se déconnecter d'une réalité qu'il essaye de contenir. Oui il y a du paradoxe la dedans. 

    Adeline Grais-Cernea a utilisé le ton qu'il fallait pour aborder l'angoisse et les méfaits sur la vie intime, sociale, professionnelle : de l'humour souvent acide, de l'auto dérision avec une pointe de moquerie, de la bienveillance surtout avec beaucoup d'empathie. Elle n'est pas une éminente psychiatre ou psychanalyste. Ces derniers étudient les phases et les traitements, elle, a vécu ces crises. C'est sans doute cela qui renforce son récit. C'est aussi cela qui la rend si proche du lecteur : un langage simple et vif.

    En personnalisant l'Angoisse, en lui donnant une identité, l'auteur la renforce dans son existence, lui donne sa place, celle qui est en trop. En même temps, lui donner une identité, c'est une façon de se soigner, lui dire au revoir, espérer ne jamais la revoir. 

    La façon de sortir de l'angoisse peut être différente selon les personnes, car encore une fois et pour rejoindre l'auteur, elle s'exprime de différentes façons. Ce qui est difficile, c'est de ne pas se sentir "bête" parce qu'au fond, on se dit que "ce n'est pas si grave, ça va passer", jusqu'à ce qu'il soit trop tard et qu'on finisse par sombrer. 
    Trouver un moyen de lutter contre ses angoisses est tout aussi compliqué que d'en parler. Car la réalité, quoi qu'on en dise, c'est qu'il n'y a pas toujours une écoute active, même des professionnels de santé. Parfois, l'aide psycho-thérapeutique ne suffit pas, et il faut l'aide de médicament. Mais la solution pour l'un, ne l'est pas forcément pour l'autre. Et doucement, on avance, on trébuche encore, mais on se relève avec plus de facilité, jusqu'à finir par marcher sans tomber... Même si parfois, on tremble et on tangue. 

En bref :

Un témoignage nécessaire, car l'angoisse, la vraie qui vous prend les tripes et commande à votre vie, elle mérite d'être reconnue pour que ceux qui en ont besoin, trouvent de l'aide. Merci Adeline Grais-Cernea !

jeudi 19 octobre 2017

"Clotilde part en colonie de vacances" - de Yann Walcker et Romain Mennetrier

De Yann Walcker et Romain Mennetrier, éditions Auzou, 2013 Jeunesse, Album.

Résumé : 

Clotilde est une adorable chouette très timide. Le jour où ses parents lui proposent de partir en colonie de vacances, c’est la catastrophe ! Elle qui déteste s’éloigner de sa famille et de ses habitudes... Le grand départ arrive et Clotilde est bien obligée de suivre le groupe. Mais cette colonie autour du monde s’annonce pleine de surprises et surtout de découvertes

Mon avis :

    Clotilde est une petite chouette qui part bientôt en colonie de vacances. Elle partage ses craintes avec ses parents, mais cela ne l'apaise pas pour autant. Entre la tristesse de les quitter et ses inquiétudes quant à ce qui va se passer durant la colonie, Clotilde a du mal à dormir. Arrive le jour du départ. Ses inquiétudes sont partagées par ses camarades. Ensemble, ils s'envolent vers une nouvelle aventure. 
    Durant cette colonie, Clotilde va apprendre à avoir confiance en elle, et apprécier ces moments de jeu et de découverte. 

    Que j'apprécie cette collection chez Auzou ! Un vrai délice de partager ces petites histoires avec mon loulou. Ici, le sujet n'est pas anodin, il va partir en vacances chez papy et mamy. Même s'il s'y plaît, même s'il a pris l'habitude d'y dormir, il y a toujours un chagrin qui l'accompagne du fait de ne pas nous avoir avec lui son papa et moi.
    Avec cette histoire, il est simple pour lui de s'identifier à cette petite chouette : son inquiétude est légitime, mais elle trouve aussi le courage d'aller au-delà. Elle devient grande loin de ses parents. 

    Les dessins sont encore une fois très colorés et agréables. Qu'il s'agisse d'animaux permet aussi à l'enfant de s'identifier à l'un ou à l'autre en fonction du comportement ou de ce qui est dit, et pas seulement parce qu'il lui ressemblerait. 

    Le mot de la fin de mon fils : "maman, je peux voler comme Clotilde ?"... Oui bon, à 4 ans, il a bien le droit de rêver.... :-). 

En bref : 

Une lecture douce avant les vacances de notre enfant : faire face à l'inquiétude et au final bien s'amuser !
Toujours de la bienveillance dans ces lectures.

"Les nouvellaires" - Sonia Frisco


De Sonia Frisco; éditions Equivox, 2002, Nouvelles.

Résumé :

Entre songe et réalité se situent Les Nouvellaires, dans le monde des sentiments.
Il est dit que Les Nouvellaires sont hors du temps et hors classement.
Et Les Nouvellaires existent, car un air nouveau a soufflé sur terre.
Quiconque les lira pourra sentir... Ce souffle neuf.

Mon avis :

    Lorsque vous appréciez la plume d'un auteur pour un livre, vous arrive-t-il de tout lire de lui ? Il y a parfois un sentiment étrange lorsque je découvre un livre parut il y a longtemps d'un auteur que j'affectionne : le plaisir de découvrir l'évolution de son écriture, ou alors ses points communs. J'aime beaucoup changer mes lectures, mais concernant les auteurs, certains sont plus présents que d'autres. 

    Le format "nouvelle" me plaît à la base parce qu'il permet d'inventer un univers en quelques pages et d'avoir un dénouement bref. Certains livres, lorsqu'ils sont trop longs, nous plongent dans un univers qu'on a même du mal à quitter. La nouvelle l'esquisse, et une fois rentré, nous en sortons quasi immédiatement. 
    Nous retrouvons l'un des premiers livres de Sonia Frisco dont vous trouverez ses ouvrages sur la page Index par auteur. Je l'ai découverte avec un livre très riche en émotion : "L'être de Sable". Dans celui-ci, l'émotion peignait les pages. Dans ces nouvelles, on découvre une autre facette de l'écriture de l'auteur : l'abstraction et la retenue. 

    Dans la première nouvelle, l'auteur met en scène les différents sentiments qui nous habitent et leurs contraires. On y voit l'orgueil que peut avoir la sagesse de se sentir toute puissance, la force de la fragilité et inversement. Cette façon de les mettre en scène tel des personnages m'a beaucoup plu. La nouvelle se suffit à elle-même. Elle montre la complexité qu'il peut y avoir en l'être humain : chaque sentiment ne va pas sans un autre. Entre l'humilité, l'impuissance, la force, l'orgueil, la pitié ou la compassion, Sonia Frisco met en évidence également la difficulté que nous pouvons avoir à vraiment nous comprendre nous-même. Un sentiment peut en cacher un autre. 

    La seconde nouvelle fait référence à ce sentiment qui nous fait sentir parfois invincible : l'Amour. Eva rencontre Andy, son monde change, elle change, mais elle l'aime, s'en rend compte. Débute une histoire qui connaîtra le jugement et la haine des personnes incapables de bienveillance. On se doute rapidement de la nature de leur relation et des enjeux de celle-ci. L'auteur nous montre ainsi les méfaits de l'effet de groupe au travail d'Eva : les fortes têtes parlent, la sympathie des autres reste discrète. Cette nouvelle m'a laissé perplexe, en attente, comme si l'histoire ne se finissait pas ainsi, ne pouvait pas se finir ainsi. Ainsi, Eva et Andy poursuivent leur chemin.

    L'imagination est ce qu'il y a de plus libre, mais aussi de plus destructeur. Dans cette troisième nouvelle, l'imagination des habitants d'un village va les conduire à une histoire aussi improbable qu'irréelle, sans jamais oser aller voir la personne concernée. C'est à la fois drôle et pathétique : ils inventent des histoires en faisant des suppositions et des raccourcis, mais n'ont peut-être aussi que cela à faire. J'y ai senti beaucoup de solitude.

    La vie d'Uma va changer, elle le sait, l'a lu dans un présage au fond d'un coffre en marbre. La quatrième nouvelle est empreinte de féerie, de fantastique et de romance. J'ai préféré les précédentes, plus terre-à-terre. L'ambiance par contre m'a énormément plu et il y aurait eu matière à développer la vie du village, de l'église dont le clocher doit être réparé. Cette quête d'amour met du temps à s'installer, Uma se cherche et en même temps redoute ce qui va lui arriver. J'ai par contre aimé la fin de la nouvelle : elle laisse la place au choix et aux conséquences de nos décisions. 

    Enfin, la dernière nouvelle me fait plutôt penser à une lettre. Elle est très courte, mais donne à réfléchir sur le sens de nos décisions : peut importe quel chemin j'aurais choisi, avec du recul, même s'il a été douloureux, j'ai pris une sage décision. Celle-ci m'a touchée. 
    
    J'ai beaucoup apprécié ce travail sur les sentiments, et également cette réflexion sur la notion de choix : les décisions que l'on prend ne sont pas toujours plaisantes, mais souvent nécessaires. Enfin, j'ai apprécié découvrir la plume de Sonia Frisco dans cet exercice. L'écriture est très épurée, laissant au lecteur de plaisir de s'imaginer la suite. 


En bref :

Des nouvelles mettant en scène les sentiments, ou les décisions que nous prenons en fonction d'eux. 

dimanche 15 octobre 2017

"Lock T1 Nepharius" - Valp


De Valp, éditions Paquet, 2004, BD, Fantasy, Aventure.

Résumé : 

Gouverné par quatre maîtres despotiques, Lock est le monde sans ciel. Les hommes s'y retrouvent prisonniers et s'ils cherchent à retourner sur terre, mille et un danger les guettent. Genre science-fiction et fantastique.       

Mon avis :

    Cela fait un moment maintenant que je souhaite me replonger dans des BD. Depuis Ekhö, Monde miroir, je n'avais pas trouvé de BD dans le même style : de l'aventure et du loufoque. Dans "Lock", des personnes de toutes nationalités et de niveau social différent se retrouvent dans ce monde dénué de ciel. Un maître aidé de trois subalternes, règnent sur ce monde, refusant d'apporter l'aide nécessaire aux hommes pour retourner sur la planète Terre. Eve est capable de déchiffrer les écrits anciens. Accompagnée de Noé, ils tentent de trouver la sortie. Sur leur chemin, ils feront la connaissance de Kymon, qui lui aussi cherche à retrouver sa femme et sa fille sur Terre. Mais le chemin qu'ils vont arpenter ne sera pas de tout repos, et la sortie, quasi-inaccessible. 
    Pour retourner chez eux, ils devront atteindre la statue de Nepharius : une vie pour un réponse. 

    Ce premier tome commence doucement, permettant à l'auteur de présenter l'univers et les personnages principaux. L'histoire est bien construite, on se doute qu'il y a des passages qui seront étayés par la suite, mais on plonge avec plaisir dans cet univers richement travaillé. La construction de l'intrigue permet de donner des indices sans dévoiler davantage des aventures que vont vivre les personnages. 

    Il y a assez peu de dialogue par rapport à des BD que j'ai pu lire par le passé. Ceux-ci sont bien écrit. Oui, je m'y attarde, car l'écriture est plaisante et facile à lire. Je me souviens de certaines BD abandonnées parce qu'il fallait déchiffrer et non lire. Les dessins sont superbes : la palette de couleur est grande et bien choisie. Certains détails permettent de s'approprier un peu plus l'univers. Il s'agit de dessins qui me parlent, ni trop ronds, ni trop anguleux. Mon bémol : certains passages manquaient de précision au coup de crayon. 

    Lock est un monde particulier, je laisse au lecteur le plaisir de découvrir à quoi il correspond pour l'être humain. J'aurais aimé en découvrir davantage sur ce monde. Mais patience, il ne s'agit que du premier tome. Réussis, car il donne envie de se plonger dans la saga. 

En bref :
 

Un premier tome réussi qui donne envie de se plonger dans l'univers de Lock accompagné de ses personnages charismatiques !
 

"Le cocon" - Mari Okazaki

De Mari Okazaki, édition Delcourt, Manga, Nouvelle. 

Résumé :



Parce qu'elle a rempli son studio d'un tas d'objets auxquels elle est très attachée, Shiori n'arrive plus à sortir. Soudain, une fille (l'amie du précédent locataire du studio) débarque brusquement dans son univers. Passé la première surprise, Shiori finit par être profondément touchée par le récit de son invitée... Ce volume rassemble six petites histoires qui tournent chacune autour d'une femme amoureuse, mais dans des contextes bien différents.

Mon avis :

    "Le cocon" regroupe plusieurs nouvelles. Leur point commun : la gestion et l'expression les émotions. Sur l'ensemble des nouvelles, la parole est donnée au féminin : il s'agit de femme, pouvant être notre sœur, amie, une personne "quelconque" oserais-je dire, car il peut s'agir de tout le monde et de personne en particuliers. 

    Dans la première nouvelle, Mar Okazaki dresse le portrait d'une Hikikomori, personne ayant complétement rejeté le monde extérieur et ne vivant que dans l'univers rassurant qu'elle s'est construit, le plus souvent sa chambre. L'auteure nous fera voir l'élément qui changera son quotidien. 
    La seconde nouvelle regorge d'un élément fantastique. Entre la raison et l'amour, il est toujours difficile de choisir. Ici, la jeune fille va lutter contre ses sentiments, car elle a un mauvais pressentiment. Au final, l'être humain conserve ses instincts, et sait aussi y faire face. 
    La troisième nouvelle est celle qui m'a le plus touchée. Comment un objet banal peut entretenir le souvenir, les liens, les sentiments. Comment avancer et faire face quand l'être aimé nous manque. Notre réalité n'est pas celle des autres. L'auteur parvient à faire émerger l'incompréhension qui nous dépasse : est-on en mesure d'appréhender la souffrance d'autrui ? 
    Dans la quatrième nouvelle, la parole est donnée au corps : objet animé et doué de conscience, on s'attarde ici à l'objet. Asakawa est mannequin main. Ses contrats reposent uniquement sur ses mains. Mais n'est-elle pas plus que de simples mains ? J'ai aimé la façon dont l'auteur nous a fait suivre l'évolution de ses sentiments. 
    La cinquième nouvelle nous plonge dans le monde du travail. Le personnage travaille sans relâche, passe des nuits blanches à produire un travail de qualité. Cependant, il n'est jamais assez bien. La fatigue, la frustration aidant, les émotions débordent et laissent couler les larmes. Mais plus encore, on comprend pourquoi elle s'est réfugiée dans le travail, attendant patiemment son retour... 
    La dernière nouvelle est énigmatique. Elle prend place à une époque ancienne. La princesse Sei est sauvée par un inconnu dont elle tombe amoureuse. Lorsque le moment de le revoir arrive, la décision qu'elle prend avant de s'isoler chez elle est proche de la folie, sans compter sur l'aspect fantastique encore une fois de la nouvelle. 

    J'ai beaucoup apprécié ces nouvelles, surtout sur la façon dont l'auteure a su faire émerger les sentiments et les émotions. Certaines pages sont exemptes de dialogues. Cela donne toute la place au coup de crayon d'émouvoir ou de répondre. 
    Les dessins sont agréables, tout en rondeur et en douceur. Il y a parfois différents styles en fonction de l'histoire. Il n'y a pas de fioritures inutiles ni de pages surchargées. Le style est très agréable à la lecture, et certains gros plans sur les visages permettent d'apprécier le réalisme des émotions qui sont communiquées. 

En bref : 

Un recueil de nouvelle qui est à la fois plein d'émotions et de beaux dessins. Les émotions y sont décrites avec justesse. 

samedi 14 octobre 2017

"Deviens ce que tu es" - Dorian Astor



Merci encore aux Editions Autrement pour cette découverte et cette recherche philosophique. 

De Dorian Astor, éditions Autrement, 2016, Essai, Philosophie. 

Résumé :

La formule est célèbre mais paradoxale : ne suis-je pas déjà moi-même ? (Fui donc pourrait être cet "autre moi" que l'on m'enjoint d'atteindre ? De Pindare à Nietzsche, de Freud à Deleuze, les philosophes se sont approprié ce fameux mot d'ordre. Pour Dorian Astor, devenir soi ne signifie pas qu'il faille devenir maître de son destin, ni même qu'on doive devenir quelque chose ou quelqu'un. Devenir ce que l'on est, c'est aussi et surtout une disposition qui nous élève, une manière de se faire moins personnel et, peut-être, d'être plus libre.

Mon avis :

    En quittant l'école primaire, je me souviens d'une carte que m'avait donnée une des institutrices dans mon "cahier de souvenir" (que de nostalgie...). Sur cette carte, il y avait une simple phrase : "Ose devenir qui tu es". Cela m'a longtemps suivi, témoignage également de qui j'étais à l'époque. Ce premier mot surtout "Ose"... Oser, aller de l'avant, cesser d'hésiter... Oui oser devenir qui j'étais vraiment, sans me cacher ou me restreindre. Le message d'une femme à une autre en devenir. 
    Alors, en ayant vu ce titre, il y a une bouffée de souvenirs qui sont venus à moi. Je n'ai pas oublié la carte, le petit mot de l'institutrice, ma surprise de l'époque et surtout ce que je n'avais pas su comprendre à ce moment-là. 

   La lecture de ce livre n'a pas été simple, et j'avoue que j'ai dû à plusieurs reprises revenir en arrière et reprendre parfois des notions. Lorsque l'on parle de pensée humaine, de construction de la pensée, il est fascinant d'en découvrir les méandres. Ce livre est réussi en cela : il est malgré tout abordable, et donne envie de revenir à ce genre de lectures. 
    La Collection dont est tiré le livre, "Les Grands Mots", contient d'ailleurs de nombreux ouvrages ayant pour thème "La discrétion, "Les croyances"... Bref, des thèmes amenant à la réflexion.

    Dorian Astor est un philosophe, germaniste et musicologue. De nombreux travaux consacrés à Nietzsche et le reste de son œuvre jalonnent le travail de cet écrivain. Avec "Deviens ce que tu es", il prend comme point de départ les écrits de Pindare ( siècle avant JC) avec "Puisses-tu, ayant acquis des connaissances, devenir tel que tu es". Par un judicieux travail philo-historique, il arrive à cette phrase célèbre de Nietzsche : "Deviens ce que tu es". 

    Ce livre est certes un peu difficile, car il aborde des notions et des concepts auxquels je ne suis plus habituée depuis la fin de mes études. Mais il est passionnant ! Il reste abordable et n'est pas insipide comme certains traités de philosophie peuvent l'être. Certains livres sont tellement denses qu'il est impossible d'en appréhender même le sens pour un profane. 

    A la lecture, on découvre la passion mais aussi la pensée de ces philosophes de l'Antiquité : base de sa réflexion, l'auteur décortique les notions de "ça, moi et surmoi". Il est difficile de résumer ce livre tellement il aborde des réflexions sur soi, ce que nous sommes et ce que l'on sent. "Devenir ce que l'on est" a également une notion de temps : on ne cesse d'avancer, de créer, de vivre, donc on devient immuablement ce que nous sommes : le présent définit notre futur, tout comme notre passé. 
En bref : 

Entre introspection et réflexion, Dorian Astor nous donne à réfléchir sur notre propre existence au travers des réflexions de ces philosophes qui ont construit la pensée humaine.