dimanche 8 octobre 2017

"Après l'orage" - Selva Almada


De Selva Almeda, éditions Métailié, 2016, Roman, Huis clos.

Résumé : 

Un garage au milieu de nulle part, province du Chaco, nord de l'Argentine. La chaleur est étouffante, les carcasses de voiture rôtissent au soleil, les chiens tournent en rond. Le Révérend Pearson et sa fille Leni, seize ans, sont tombés en panne ; ils sont bloqués là, le temps que la voiture soit réparée. El Gringo Brauer s'échine sur le moteur tandis que son jeune protégé Tapioca le ravitaille en bières fraîches et maté, et regarde avec curiosité ces gens si différents qui lui parlent de Dieu.
Dans ce huis clos en plein air, le temps est suspendu, entre-deux, l'instant est crucial : les personnages se rencontrent, se toisent, s'affrontent. Crest peut-être toute leur vie qui se joue là, sur cette route poussiéreuse, dans ce paysage hostile et désolé, alors que l'orage approche.
Selva Almada signe ici un premier roman époustouflant de maîtrise, avec une prose sobre, cinématographique, éminemment poétique.


Mon avis :

    Il y a des sensations qu'on ne saurait expliquer. J'ai regardé il y a peu le film "Brimstone". Suffoquant, intense avec un jeu d'acteur incroyable. Ce film m'avait plu. Même s'ils sont différents, le révérend Pearson m'a fait penser à celui du film, le côté sadique en moins. 

    Sillonnant les routes au nord de l'Argentine, le Révérend Pearson et sa fille Leni sont contraints d'être remorqués dans un garage isolé, la voiture étant en panne. Durant le reste de l'après midi, les souvenirs plus rudes qu'agréables remontent à la surface. El Gringo Brauer s'occupe de la voiture, n'appréciant pas spécialement que le Révérend discute avec Tapioca, l'adolescent vivant avec lui au garage. Il y a beaucoup de tension durant ces quelques heures : on se cherche, on se confronte. Jusqu'à l'arrivée de l'orage qui signera l'avenir de certains protagonistes. 

    L'atmosphère suffocante de ce livre est parfaitement rendue avec un rythme soutenu. Les chapitres sont courts, suffisant pour créer une impatience, une curiosité. Selva Almada a su retenir la pression au début, le temps de dresser la scène principale. Il y a beaucoup de visuel dans ce livre, on en ressent davantage la chaleur, le soleil, la sécheresse de la terre. Un scénario. 

    La relation entre le Révérend et sa fille est étrange, comme si l'un et l'autre se mentent en façade pour ne pas avoir à aborder les sujets les plus difficiles, les plus compliqués de leur histoire. Ils sillonnent ensemble les routes depuis longtemps, leur silence est autant de dialogue que les prises de parole qu'ils ont. 
    Entre El Gringo et Tapioca, On ressent beaucoup plus la tendresse qui les unit, même si elle est maladroite, pudique. Ils vivent loin de la ville, réparant les voitures, n'ayant que peu de contact avec les autres. Tapioca va d'ailleurs bien s'entendre avec Léni, encore une fois à travers de nombreux silences

    Ce huis clos, malgré le fréquent retour dans le passé, est efficace et on ne ressent pas de l'ennui. Chaque bribe de passé a son importance pour comprendre la personnalité des protagonistes. Le livre est également entre-coupé de certains sermons du Révérend qui sont étranges, cette ferveur me gênait. 

    La religion n'est pas le sujet principal, mais elle contribue également à cette atmosphère pesante. Le Révérend n'y fait pas référence de façon fanatique. Il y a une forme de manipulation à sa façon de parler et de se comporter qui met mal à l'aise
    Enfin, dans ce livre, il ne se passe "pas grand chose", il n'y a pas de scène d'action intense. Mais il y'a le rapport humain, le rapport que l'homme a avec son environnement, son attachement et sa façon de vivre. 
    Et enfin, l'orage, qui n'est pas sous-jacent au début du livre, sera un moment déterminant dans le livre : c'est le moment où les décisions qui seront prises ne permettent pas de retour en arrière

    Mon bémol : il y a des questions qui n'ont pas de réponses. Ma curiosité n'est pas assouvie. J'aurais tant voulu savoir, et comprendre...

En bref :

Un livre dont l'atmosphère suffocante met en exergue les relations humaines. Le Sacré arrive à mon sens en second plan et permet aux personnages de se révéler davantage dans leur questionnement.

2 commentaires:

  1. une lecture dont on ne doit pas ressortir indemne

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    1. Non, il y a quelque chose de saisissant et d'hypnotique dans cette lecture.

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