jeudi 4 avril 2019

"Jours d'inceste" - Anonyme

Anonyme, aux éditions Payot, Témoignage, 2017.

Résumé :


« Je crois que tout le monde a le droit de raconter son histoire. Pour diverses raisons, j’ai choisi l’anonymat pour raconter la mienne. » Elle revient de l’enfer, elle est descendue si loin dans l’horreur, elle a survécu, elle témoigne. Parce qu’elle a tenu à rester anonyme, l’auteure de Jours d’inceste porte la parole de celles ou ceux qui ne peuvent ou n’osent encore parler. Ce qu’elle décrit de l’intérieur avec sa voix unique, radicale, et qu’elle a enduré de la petite enfance jusqu’à l’âge de vingt et un ans, pourra choquer ceux qui refusent de savoir. Les autres, tous les autres, reconnaîtront dans ces pages la vérité sur une emprise absolue, la vérité sur le tabou des tabous.

Mon ressenti :

Chronique différente de ce que je vous propose habituellement. Vous me comprendrez sans doute au vu du sujet particulièrement difficile.

    J'ai toujours lu des témoignages. La vie réelle est souvent bien plus horrible que n'importe quelle fiction. Elle ajoute à l'horreur la culpabilité, la souffrance, la peur de l'avenir. Est ce que ces personnes ont raison de mettre leur vie sur papier et partager cela avec le plus grand nombre ? OUI.

    Qu'il s'agisse de la petite enfance, de guerre, de discrimination, de violence, tout témoignage est nécessaire pour ne pas se mettre des œillères. Mais plus encore, se rendre compte d'une réalité non fantasmée. Dans un roman, on peut mélanger la réalité et fiction, on peut prendre un fait divers et extrapoler autour. Mais des agressions, cette souffrance qui s'accroche au corps et ne se détache pas, on aimerait plutôt se dire qu'on a tout inventé et ne pas faire face à cette réalité. Mais que reste-t-il lorsqu'une vie est brisée ?

    J'ai été profondément peinée et choquée de ce texte et il m'a fait me poser diverses questions. Comme pour le livre "La démesure" de Céline Raphaël, je n'ai pas d'avis sur le livre en lui-même, son écriture ou son style. Cela serait manquer de respect à la souffrance et au témoignage de cette personne. Il y a des éléments particulièrement choquant et l'auteur choisit de les révéler de façon anonyme pour se protéger et protéger l'équilibre sans doute qu'elle a su se bâtir. 

    C'est le premier témoignage que je lis où il est ouvertement question du "plaisir" physique lors d'une agression. Ce qui est dit est cru, choquant, source de malaise pour le lecteur. Mais c'est un fait, et la victime (car il s'agit ici d'une VICTIME) doit vivre avec ces abus ces sensations dans son corps et dans son âme. Elle égrène les souvenirs, et les conséquences sur sa vie adulte et surtout sur ses relations avec les hommes.

    Elle n'évoque pas vraiment la façon dont elle a surmonté ces traumatismes. Elle nous fait part des faits, simplement des faits. Et ce qui m'a le plus chagriné, où les larmes me sont montées aux yeux, c'est l'incapacité de trouver de l'aide malgré les personnes à qui elle en a parlé. POURQUOI ? Je peux entendre qu'il n'est pas facile d'écouter les victimes. En tant qu'infirmière, j'en ai recueilli des mots douloureux. Mais comment peut-on tourner le dos à un enfant en souffrance ? D'autant plus quand il s'agit de sa mère ?
 
    Ce témoignage n'est pas simple pour ses mots, pour ce qu'il évoque, pour ce qu'il referme. Et pourtant, oui, je persiste, il est nécessaire de laisser aux victimes un endroit ou déposer leur témoignage (pas leur plainte, cela est une autre histoire). Il est important que personne n'oublie que cela arrive, parfois dans des familles insoupçonnables. Récemment encore, un participant à un jeu télévisé a révélé son visage… Consulter des images à caractère pédopornographique, c'est une autre manière d'abuser les enfants. À mes yeux, cette population d'agresseur n'a aucune âme…

    Maintenant, j'aimerais exposer une crainte. À la lecture de ce livre, à la vue de ce que la victime expose, révèle, j'ai peur… Car il n'y aura pas que des personnes bien intentionnées qui liront ce témoignage et ça me fait mal de le penser…

    En France, l'inceste ne fait pas parti du code pénal. Il devrait. À lui seul, ce mot révère une quantité d'horreur, de solitude et de souffrance.

    Un site qui peut être consulté pour toute victime d'inceste : https://aivi.org/ Association internationale des victimes de l'inceste.
Ne pas fermer les yeux.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire